HORATIO

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12/07/2012

Comprenez-vous Hamlet?

Avertissement au lecteur :

Je vois poindre un problème : mon discours est-il susceptible de nuire à l’auteur ? Je ne crois pas, Yannick Butel est sans aucun doute un homme de théâtre.

Mon discours a la particularité de s’appuyer sur le discours de l’Autre. C’est sur la base de ce principe que j’ai « découvert » que la mort de Gertrude passait à la trappe dans l’analyse que faisait Lacan de la scène finale dans son Séminaire sur le désir et son interprétation.

Depuis je n’ai de cesse de rechercher dans les analyses critiques qui sont faites de la pièce les points qui sont occultés pour parvenir toujours à la même conclusion : Hamlet veut tuer Claudius ! Si on ne peut pas dire ce que représente Hamlet on peut toujours essayer de dire ce qu’il ne représente pas.

Maintenant s’il subsiste un problème, ce n’est peut-être pas le mien mais celui de la recherche, où de la direction de la recherche. Il ne faut pas oublier que « le pouvoir de la langue » celui de l’auteur se tient dans une institution réputée pour sa « langue du pouvoir ».

Un problème personnel peut avoir influencé mon discours. J’ai essayé de le corriger mais pas totalement. Je souhaite qu’il en reste trace parce que je suis moi-même dans un processus de démonstration.

Yannick Butel dit deux choses importantes qui éclairent mes propres analyses :

- Première chose importante : Après plusieurs lectures, plusieurs visionnages, je me suis dis : Hamlet menace de morts Horatio s’il parle de l’apparition. Au moment de la souricière, il lui rappelle qu’il est sous le coup de cette menace en le flattant ; et Horatio ne bouge pas. Je me suis demandé même si Horatio connaissait le contenu des révélations du spectre lorsque Hamlet lui demande de se placer au début de la souricière (Acte 3 scène 2). J’ai fini par me persuader que oui. Mais Yannick Butel réinstalle le doute en moi à la note 11 (p194) : « Horatio a-t-il une preuve ? Hamlet lui a-t-il révélé le propos du spectre dont il doute ? Rien n’est certain au regard du caractère obscur des paroles du prince qui dit : « l’une des scènes se rapproche des circonstances que je t’ai dites de la mort de mon père ». Le caractère indéterminé des paroles d’Hamlet trouvera un écho neutre chez Horatio au moment de la délibération. »
- En d’autres termes, Horatio ne sait pas ce qu’il doit observer pendant la souricière. Il ne peut donc pas s’interposer en raison des réactions du roi. Il ne peut guère plus s’interposer en raison des réactions d’Hamlet qui perturbe le spectacle, qui est odieux avec Ophélie, qui offense le couple royal en faisant passer Lucianus pour le neveu de Gonzague.
- Au dénouement de l’action, Horatio est loin d’être neutre…

- Deuxième chose importante, à plusieurs reprises Yannick Butel rappelle que les ordonnances du roi pour l’exil d’Hamlet vers l’Angleterre sont écrites juste après la souricière. Après le meurtre de Polonius, elles ne sont pas retouchées. Ce qui veut dire que Claudius n’attend pas le meurtre de Polonius pour programmer l’assassinat d’Hamlet. Il lui faudra cependant le prétexte de ce meurtre pour donner l’ordre du départ. C’est Hamlet qui déclenche le mécanisme du piège – comme il va le faire au moment du duel.

- Sur le moment, j’ai pensé que Yannick Butel s’était trompé. Je cherchais moi-même à savoir si les ordonnances n’avaient pas été scellées dès la scène de la galerie (Acte 3 scène 1). C’est en retournant au texte que je me suis aperçu de mon erreur : l’auteur parle bien des extraits n°2 et n°6 qui attestent que les ordonnances sont prêtent au moment de la pièce de théâtre et qu’elles ne sont pas retouchées après le meutre de Polonius.
- Sauf que Yannick Butel oublie de citer ce passage où Hamlet demande à sa mère si elle est au courant pour l’Angleterre et où Hamlet se doute que c’est un piège et qu’il va devoir faire sauter l’artificier avec son propre pétard.

Extrait n° 1 : après la scène de la galerie, où Hamlet et Ophélie sont espionnés par Claudius et Polonius – et peut-être par Gertrude.

LE ROI. - L'amour ! Non, son affection n'est pas de ce côté-là ; non ! Ce qu'il disait, quoique manquant un peu de suite, n'était pas de la folie. Il y a dans son âme quelque chose que couve sa mélancolie ; et j'ai peur de voir éclore et sortir de l'oeuf quelque catastrophe. Pour l'empêcher, voici, par une prompte détermination, ce que j'ai résolu : Hamlet partira sans délai pour l'Angleterre, pour réclamer le tribut qu'on néglige d'acquitter. Peut-être les mers, des pays différents, avec leurs spectacles variés, chasseront-ils de son coeur cet objet tenace sur lequel son cerveau se heurte sans cesse, et qui le met ainsi hors de lui-même... Qu'en pensez-vous ? (Acte 3, scène 1)

Extrait n°2 : tout de suite après la souricière – Hamlet n’a pas encore tué Polonius.

LE ROI. - Je ne l'aime pas. Et puis il n'y a point de sûreté pour nous à laisser sa folie errer. Donc tenez-vous prêts ; je vais sur-le-champ expédier votre commission, et il partira avec vous pour l'Angleterre : la sûreté de notre empire est incompatible avec les périlleux hasards qui peuvent surgir à toute heure de ses accès lunatiques. (Acte 3, scène 3)

Extrait n°3 : dans la chambre de Gertrude – Hamlet vient de tuer Polonius, mais Claudius ne le sait pas encore. Sa mère sait également qu’il doit partir pour l’Angleterre. Hamlet sait déjà que c’est un piège.

HAMLET. - il faut que je parte pour l'Angleterre. Vous le savez ?.
LA REINE. - Hélas ! je l'avais oublié : c'est décidé.
HAMLET, à part. - il y a des lettres cachetées, et mes deux condisciples, auxquels je me fie comme à des vipères prêtes à mordre, portent les dépêches ; ce sont eux qui doivent me frayer le chemin et m'attirer au guet-apens.
Laissons faire : c'est un plaisir de faire sauter l'ingénieur avec son propre pétard : j'aurai du malheur si je ne parviens pas à creuser d'une toise au-dessous de leur mine, et à les lancer dans la lune. Oh ! ce sera charmant de voir ma contre-mine rencontrer tout droit leur projet. (Montrant Polonius.) Commençons nos paquets par cet homme, et fourrons ses entrailles dans la chambre voisine. Mère, bonne nuit ! Vraiment ce conseiller est maintenant bien tranquille, bien discret, bien grave, lui qui, vivant, était un drôle si niais et si bavard. Allons, monsieur, finissons-en avec vous. Bonne nuit, ma mère ! (La Reine sort d'un côté ; Hamlet, d'un autre, en traînant le corps de Polonius.). (Acte 3 scène 4)

Extrait n°4 : Hamlet a caché le corps de Polonius. Tous sont à sa recherche

LE ROI. - J'ai envoyé à sa recherche et à la découverte du corps. (A part.) Combien il est dangereux que cet homme soit libre ! Pourtant ne le soumettons pas à la loi rigoureuse : il est adoré de la multitude en délire, qui aime, non par le jugement, mais par les yeux ; et, dans ce cas-là, c'est le châtiment du criminel qu'elle pèse, jamais le crime.
Pour que tout se passe doucement et sans bruit, il faut que cet embarquement soudain paraisse une décision réfléchie.
Aux maux désespères il faut des remèdes désespérés.
(Entre Rosencrantz). ou il n'en faut pas du tout. Eh bien ! que s'est-il passé ? (Acte 4 scène 3)

Extrait n°5 : Hamlet fait l’ignorant pour l’Angleterre.

LE ROI. - Hamlet, dans l'intérêt de ta santé, qui nous est aussi chère que nous est douloureux ce que tu as fait, ton action exige que tu partes. d'ici avec la rapidité de l'éclair. Va donc te préparer. Le navire est prêt, et le vent vient à l'aide ; tes compagnons t'attendent, et tout est disposé pour ton voyage en Angleterre.
HAMLET. - En Angleterre ?
LE ROI. - Oui, Hamlet.
HAMLET. - C'est bien.
LE ROI. - Tu parles comme si tu connaissais nos projets.
HAMLET. - Je vois un chérubin qui les voit. Mais, allons en Angleterre ! Adieu, chère mère !
LE ROI. - Et ton père qui t'aime, Hamlet ?
HAMLET. - Ma mère ! Père et mère, c'est mari et femme ; mari et femme, c'est même chair. Donc, ma mère ! En Angleterre, allons ! (Il sort.). (Acte 4 scène 3)

Extrait n°6 : Hamlet doit se préparer à embarquer – Claudius resté seul avoue le piège.

LE ROI, à Rosencrantz et à Guildenstem. - Suivez-le pas à pas ; attirez-le vite à bord. Pas de délai ! Je le veux parti ce soir. Allez ! J'ai expédié et scellé tout ce qui se rapporte à l'affaire. Hâtez-vous, je vous prie. (Sortent Rosencrantz et Guildenstem.) Et maintenant, frère d'Angleterre, si tu estimes mon amitié autant que te le conseille ma grande puissance, s'il est vrai que tu portes encore, vive et rouge, la cicatrice faite par l'épée danoise, et que tes libres terreurs nous rendent hommage... tu n'accueilleras pas froidement notre message souverain, qui exige formellement, par lettres pressantes, la mort immédiate d'Hamlet. Obéis, Angleterre ! car il me brûle le sang comme la fièvre, et il faut que tu me guérisses. Jusqu'à ce que je sache la chose faite, quoi qu'il m'arrive, la joie ne me reviendra jamais. (Il sort.). (Acte 4 scène 3)



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